Gardasil : la (très) chère rentrée vaccinale d'Emmanuel Macron est arrivée, que penser de son efficacité ?
SANTÉ - C'est pour le président de la République un étonnant cheval de bataille. En mars dernier, Emmanuel Macron annonce vouloir "généraliser" la vaccination des élèves de 5e de 11 à 13 ans. Enfilant son costume de médecin, il faut selon lui "aller vite" et réaliser "dès l'école un énorme travail d'information", voire "ne pas exclure qu’on aille vers la vaccination obligatoire quand tout cela sera installé et qu’on aura les bonnes recommandations". Mais à quel prix et pour quel résultat ? L'innocuité du produit pose par ailleurs question alors qu'un procès aux États-Unis s'est ouvert cette année à cause des effets secondaires et d'un présumé défaut d'efficacité du Gardasil, selon les plaignants.
Pour le moment, le vaccin Gardasil (du laboratoire Merck, en situation de quasi monopole) n'est pas encore imposé aux jeunes adolescents. L'injection reste conditionnée à un accord parental. Mais la rentrée scolaire 2023 est bien celle d'une campagne de vaccination tous azimuts. Près de 800.000 élèves sont concernés. Selon la communication gouvernementale, il s'agit d'"améliorer la couverture vaccinale pour prévenir les 6.000 nouveaux cas de cancers et les 30.000 lésions précancéreuses du col de l’utérus causées chaque année par cette infection."
Communication flatteuse
Le ministre de la Santé Aurélien Rousseau a même livré, le 1er septembre, un entretien très percutant au média Brut pour détailler l'opération : "Les premières vaccinations commence à partir du 2 octobre, dans les collèges. Une campagne de communication pour vous donner toutes les infos commencent le 4 septembre. Un vaccin est disponible pour permettre d'éradiquer les cancers du col de l'utérus mais aussi du vagin, de la vulve, de l'anus, cela concerne tout le monde. (...) Il y a des pays qui ont réussi à éradiquer ces maladies. C'est entre vos mains (...) Il y a les personnels de santé qui sont là pour vous répondre, on a une chance de se protéger tous collectivement."
En somme, un mois est consacré au "travail d'information", promis par le chef d'État. Puis les doses sont proposées aux parents d'élèves qu'Aurélien Rousseau espère persuader du bien-fondé de l'opération. Leur progéniture reçoit alors deux doses, la principale et son rappel quelques mois plus tard.
Précisée comme "gratuite", celle-ci a pourtant un coût salé pour le contribuable. Le prix d'une dose du vaccin Gardasil 9 est de 115,84 euros. Il faut donc compter 231,68 euros pour le schéma vaccinal complet, dans la majorité des cas (1). À titre de comparaison, cela représente environ 2,5% de la dépense par élève et par an consentie par l'État au sein de l'éducation nationale (chiffres 2018) pour les collégiens.
Le vaccin contre le papillomavirus humain (HPV) est le plus cher des vaccins pris en charge par l'Assurance maladie. Le total pourrait atteindre une somme supérieure à 150 millions d'euros. Une somme à laquelle il faut ajouter l'organisation de cette campagne de santé publique, la mobilisation du personnel de santé qui s'occupe des consultations, etc.
Prix exorbitant pour le contribuable, super marge pour le fabricant
Mais combien coûte la production du vaccin pour le laboratoire ? On peut estimer le coût de production à quelques dizaines de cents d'euros, autour de 50 centimes. Comment expliquer une telle différence avec le "prix de vente" ? La recherche et le développement du produit, à l'instar de ce qui s'est produit par exemple récemment dans le développement du vaccin anti-Covid-19 Pfizer/BioNTech, est grandement soutenu par l'argent public. Et on ne peut pas dire que la publicité du produit coûte cher au fabricant : le gouvernement s'occupe de tout avec un président de la République prêt à s'engager personnellement, tel un VRP de luxe. Après tout, ce dernier a déjà collaboré avec Pfizer.
Le Gardasil est une vraie machine à cash. Entre 2006 et 2015, Merck a engrangé près de 14 milliards de dollars pour ses ventes de Gardasil. En novembre 2022, Merck annonce une publication autour de son vaccin dans la revue Expert Review Of Vaccine. D'après elle, "il a été observé que l'utilisation de Gardasil entraînait des réductions des taux de lésions cervicales de haut grade (précancéreuses) et de bas grade, ainsi que des réductions de certaines maladies non liées au virus du papillome humain et de l'infection au VPH chez les femmes et les hommes". Ravinder Dhawan, le vice-président chez Merck Research Laboratories indiquait alors, très enthousiaste, qu'il fallait "faire plus pour étendre la vaccination aux hommes et aux femmes dans le cadre de la lutte mondiale pour réduire l'incidence de certaines maladies et cancers liés au VPH".
Au troisième trimestre de l'année 2022, Merck présente des ventes de produits pharmaceutiques en augmentation de 13%, qui atteignent 13 milliards de dollars. L'objectif visé en matière de chiffre d'affaires dépasse les 60 milliards de dollars. Et la réussite commerciale du vaccin Gardasil est l'un des éléments clef de cette performance. La campagne de vaccination française ressemble sous cet angle à un joli pactole pour Merck.
Efficacité pour le moins discutée au travers des études scientifiques
Vis-à-vis de ce prix incroyable, le produit est-il efficace ? À quoi sert-il exactement ? Est-il sans effets secondaires ? La vaccination contre les infections à HPV doit, d'une façon générale, empêcher la survenue de lésions précancéreuses génitales chez la femme. L'objectif recherché - et vanté par le ministre de la Santé - dont la formation est celle d'un professeur d'histoire géographie, cet ancien de l'ENA n'a pas de cursus médical - est donc "l'éradication" des cancers du col de l'utérus, de la vulve et du vaccin, comme de l'anus chez l'homme.
Pour autant, une grande partie des infections par le papillomavirus, dont il existe une quarantaine de souches, ne débouchent pas - heureusement - sur une lésion cancéreuse. Neuf fois sur dix, l'infection disparaît de façon naturelle, sans aucun soin, selon une communication de la Haute autorité de santé (HAS). Au-delà d'un ou deux ans, si l'infection persiste, des dysplasies (des lésions précancéreuses, ndlr) peuvent alors se manifester, par exemple au niveau du col de l'utérus. Mais là encore, trois fois sur quatre, ces dysplasies disparaissent en quelques mois. Les HPV sont finalement très communes : 80% des personnes sont exposées à ce virus. Et restent peu graves en grande majorité : 0,7% des infections dégénèrent en cancer, après un délai moyen de 30 années.
Voilà qui rend bien difficile le moyen de prouver avec certitude l'efficacité d'un vaccin contre ce type de maladie. Et qui interroge sur les budgets alloués par rapport à d'autres enjeux de santé publique qui concernent les enfants et les jeunes.
En 2018, la médecin cancerologue et spécialiste en santé, Véronique Chabernaud rappelait le manque de recul sur l'efficacité de ces injections. Selon elle, les véritables résultats en la matière ne peuvent être connus que seulement "dans vingt ans". Car "les cancers se développent plutôt entre 40 et 60 ans et on vaccine des jeunes filles de 9 à 15 ans." Cela pour une vaccination qui, de toute façon, ne remplace pas le dépistage par frottis cervico-utérin, demeurant indispensable.
Pour convaincre de l'efficacité de son produit, le laboratoire Merck a communiqué notamment à propos d'une étude suédoise publiée en octobre 2020. L'analyse de ses résultats montrerait que le nombre de cas de cancers de l'utérus diminue de façon importante chez les femmes vaccinées, notamment en cas de vaccination avant 17 ans. Pourtant, dans un avis rendu en septembre 2017, la HAS précise que "les données disponibles à ce jour ne permettent pas de répondre aux interrogations concernant l’efficacité en termes de prévention des cancers, comme pour les vaccins Gardasil ou Cervarix (le vaccin anti-HPV de GSK, ndlr)" Voilà qui étonne alors que cet élément est mis en avant dans les discours du ministre de la Santé.
D'après Aurélien Rousseau, la promesse d'éradiquer ce type de cancers a déjà été tenue dans d'autres pays. Cette affirmation ne tient pas l'épreuve des faits. En 2022, en Australie, qui a connu des campagnes générales de vaccination contre les HPV, le nombre estimé de nouveaux cas de cancer du col de l’utérus diagnostiqués est de 942 chez les femmes. En Suède, pour l'année 2019, l'augmentation de ces mêmes cancers est constatée dans une étude par le chercheur Lars Jorgensen. D'autres études scientifiques montrent une tendance similaire : en 2020, il est montré que "parmi les femmes correctement dépistées avec des résultats normaux, il y a eu une forte augmentation de l'incidence en 2014-2015 par rapport aux années précédentes" (étude Wang).
Effets secondaires et procès aux États-Unis
Enfin, le vaccin est-il sans danger ? Le sujet a de quoi inquiéter. Il apparaît dans un premier temps un risque d'effet secondaire de 1 à 2 cas pour 100.000 jeunes femmes vaccinées de développer un syndrome de Guillain-Barré (cf. une étude épidémiologique réalisée par l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament - ANSM).
Et ce risque, bien présent et avéré, disparaît d'une étonnante façon de la communication soutenue par Emmanuel Macron autour du Gardasil. Dans un dépliant mis au point par Santé Publique France, "Les 5 bonnes raisons de se faire vacciner", il est présenté que "les réactions sont peu fréquentes et bénignes" et que "dans la grande majorité des cas, il n’y a pas d’effet secondaire après la vaccination contre les HPV. Parmi les effets secondaires les plus fréquents, on peut observer une douleur ou une rougeur au point de la piqûre. Il n’y a pas de lien démontré scientifiquement entre la vaccination contre les HPV et la survenue de maladies auto-immunes." L'étude pharmaco-épidémiologique française l'indique bel et bien pourtant. L'oncologue Véronique Chabernaud décrivait, il y a 5 ans, avant la décision de mener une telle campagne de santé généralisée, un "vaccin [qui] n'est quand même pas anodin" avec des effets secondaires comme "des tremblements" ou des effets "de rigidité".
D'autres signaux sont préoccupants. Depuis février 2023, les États-Unis ont enregistré l’ouverture d’un méga procès contre le laboratoire pharmaceutique Merck, sous le principe d'une class action. Les plaignants attaquent à cause d'effets secondaires graves et parfois mortels, attribués selon eux au Gardasil. Des effets secondaires comme une insuffisance ovarienne prématurée (ménopause) ou le syndrome de tachycardie orthostatique posturale (STOP), à propos desquels Merck aurait oublié de communiquer, comme sur les limites patentes de l'efficacité en matière de protection contre les cancers liés à une infection sexuellement transmissible de son produit.
Outre-Atlantique, fin août, une rencontre entre les avocats et le juge chargé de l'affaire prépare le déroulement du premier procès d'une longue série. Des tractations financières liées au dédommagement de victimes présumées du vaccin Gardasil sont déjà évoquées. C'est au même moment qu'Emmanuel Macron et son gouvernement plonge la France et ses élèves les plus jeunes dans une frénésie vaccinale. Avec une application toute particulière à reprendre la communication qu'a développée le fabricant Merck à propos de son produit. En 2014, des experts d'Europe et de France avaient précipité l'autorisation de la première version du vaccin Gardasil. Certains étaient en conflit d'intérêts avec le laboratoire pharmaceutique. Un scandale vite oublié.
Note :
(1) L'Agence européenne du médicament recommande jusqu'à 3 doses. L'âge de la première vaccination ou le profil du vacciné peut entraîner des recommandations différentes.
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