La revue d’actu de France-Soir : semaine du 14 août 2023
La revue d’actu de France-Soir est une revue de presse hebdomadaire articulée autour de l’actualité politique, économique et médiatique, tant française qu’internationale. Sans pour autant chercher à les ignorer, cette rubrique n’a pas forcément vocation à s’attarder sur les sujets les plus discutés de la semaine. Elle s’attache plutôt à revenir – avec un regard gentiment acerbe – sur des nouvelles parfois passées inaperçues au milieu de l’intense flux d’informations hebdomadaires.
Au programme de la Revue d'actu de France-Soir cette semaine : le ministre de l’Intérieur en marche vers 2027, Sarko l'ami de Darmanin... et de Poutine (mais contre rémunération), Borne siffle la rentrée interministérielle, canicule versus canipull, l’Allemagne sur les traces de la Stasi, CBDC ou le contrôle absolu de l’argent, reconnaissance faciale pour traquer les retraités, ChatGPT le nouveau censeur, les navigateurs internet dans le viseur de l'exécutif, la France repaire de millionnaires, Soros quitte l’Europe, inflation sans fin, profits pour les grosses entreprises et faillites pour les autres, ironie d’une histoire autour de L’Huma… mais aussi la traduction exclusive du discours (en novlangue) de Macron dans le Var (qui mélange 1789, 1944 et 2023), sans oublier un nouvel épisode du feuilleton de l’été (nigérien) !
Une douzième RDA au menu copieux !
En ce mois d’août, où il est de rigueur de prendre du bon temps en laissant volontiers de côté les mornes actualités, la semaine qui vient de s’écouler nous rappelle qu’il n’y a jamais de vacance en politique… ni en matière d’atteintes aux libertés publiques et individuelles, tant en France qu’à l’étranger.
FRANCE
Lundi, France-Soir s’intéressait au cas de « Darmanin [qui] prépare [déjà] le terrain pour 2027 ».
Le journal rappelle que « Emmanuel Macron ne pourra pas se [re]présenter en 2027, son camp sait [donc] bien qu'il va devoir lui trouver un successeur. Lui-même voudrait que "celles et ceux qui [l']ont accompagné depuis maintenant six ans puissent prendre le relais". [Comme] Édouard Philippe, par exemple, [qui] "est un ami" ».
Du côté du ministre de l’Intérieur, pas d’amitié qui tienne avec l’ancien Premier ministre quand le trône de l’Élysée est en jeu. France-Soir explique que même s’il a mal vécu d’avoir été « écarté de Matignon par le maintien d'Élisabeth Borne, [Gérald Darmanin] envisage d'ores et déjà l'étape d'après (...), guidé par sa "boussole populaire" ».
France-Soir indique que le locataire de Beauvau compte d'ailleurs « organise[r] sa rentrée politique le 27 août prochain, dans son fief électoral de Tourcoing. Y seront attendues quelque 400 personnes, dont 90 parlementaires, issus de la majorité et d'autres formations politiques, ainsi que des ministres ».
Une soirée ostensiblement « populaire ».
Patrick Vignal, l’un des députés Renaissance qui devrait être présent à cette petite sauterie – ou qui mériterait de l’être – expliquait, jeudi, à France Info que, selon lui, « Gérald Darmanin fait partie de ces ministres qui sont capables de parler à toute la France ».
« De parler à » ou « de taper sur ». Au choix.
Pour le parlementaire, Gérald Darmanin « a déjà fait quelque chose d'assez exceptionnel : il a fait un couple parfait avec Dupond-Moretti ».
Au regard du parcours des deux hommes, pas sûr que le ministre de l’Intérieur goûte particulièrement ce compliment sur son mariage de raison avec le garde des Sceaux... En revanche, s’il y en a bien une personnalité politique dont Gérald Darmanin ne reniera jamais l’héritage, c’est sûrement Nicolas Sarkozy ! Sans compter que, hasard du calendrier, l’ancien Président vient justement d’offrir son soutien au ministre de l’Intérieur pour la future élection présidentielle.
C’est BFMTV qui nous indiquait, mercredi, que « Nicolas Sarkozy, dans son nouveau livre, adoube Gérald Darmanin qui a sa préférence pour 2027 ».
La chaîne d’information cite notamment le passage du livre dans lequel Sarkozy donne sa bénédiction au pensionnaire de Beauvau : « Jusqu'à présent, les faits lui ont largement donné raison. Saura-t-il franchir une autre étape, voire l'étape ultime, celle qui mène à la présidence de la République? Je le lui souhaite, car il a des qualités évidentes ».
BFM précise que c’est surtout « le "succès" d'un de ses "amis" [qui] ferait "plaisir" à l'ancien locataire de l'Élysée, qui ajoute : "Il est (...) l'un des quadragénaires les plus prometteurs” ».
Sans surprise, Nicolas Sarkozy préfère son « ami » Darmanin, sorte de mini-lui, à Édouard Philippe, « l’ami » de Macron et de Juppé.
En bref, chacun chez soi et les moutons seront bien gardés.
De son côté, jeudi, Mediapart se montrait surpris des déclarations tenues la veille dans Le Figaro par l’ancien chef de file des Républicains.
Le journal numérique ironisait sur cette « sorte de jeu estival, [dans lequel] Le Figaro a surpris son monde en proposant un texte à trous, mercredi 16 août, autour de l’interview “exclusive” de l’ex-président de la République Nicolas Sarkozy ».
Le journal en ligne décide donc d’en citer plusieurs extraits, avant de chercher à combler ces fameux « trous ».
Par exemple, quand Nicolas Sarkozy déclare aux journalistes du Figaro que « les Russes sont des Slaves. Ils sont différents de nous. La discussion est toujours difficile et a suscité beaucoup de malentendus dans notre histoire commune. Malgré cela nous avons besoin d'eux et ils ont besoin de nous ».
Ou quand l’ancien chef de l’État considère avoir « eu de profonds désaccords avec Vladimir Poutine [et estime avoir] pris [s]es responsabilités en 2008, quand [il] étai[t] président du Conseil des chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne ».
Mediapart y voit surtout un récit légèrement révisionniste de l’histoire sarkozienne, puisqu’en l’occurrence, d’après le journal, « étrangement, Nicolas Sarkozy comme les journalistes occultent un élément de contexte fondamental : l’argent. Et plus précisément : l’argent russe reçu par l’ancien président de la République depuis son départ de l’Élysée en 2012 ».
Mediapart explique que « l’ex-chef de l’État a pourtant conclu en 2019 un contrat de conseil pluriannuel, dont le montant total s’élève à 3 millions d’euros, avec le groupe d’assurances russe Reso-Garantia, contrôlé par les milliardaires Sergey et Nikolay Sarkisov ».
Le journal numérique rappelle que, « début 2020, [Nicolas Sarkozy] a reçu 500 000 euros en provenance de Russie au titre de ce contrat sur son compte à la banque Edmond de Rothschild, ce qui a provoqué l’ouverture d’une enquête préliminaire par le Parquet national financier ».
Plus intéressant encore, « un an avant la conclusion de ce contrat, Nicolas Sarkozy vantait les mérites de Vladimir Poutine lors d’une soirée à Moscou organisé en novembre 2018 par le Russia Direct Investment Fund (RDIF), principal fonds souverain de l’État russe. Au même moment, l’ancien président a touché 300 000 euros d’une mystérieuse entité, portant le même nom qu’une des filiales de RDIF ».
À ce prix là, on comprend mieux pourquoi Nicolas Sarkozy souhaite continuer à « discuter » avec les Russes.
Mediapart ajoute que « comme le montre une vidéo de l’événement [disponible dans l’article, ndla], Nicolas Sarkozy avait rappelé au cours de cette soirée sa grande proximité avec Vladimir Poutine, le présentant comme un “ami” de “toujours” ».
De Darmanin à Poutine… Sarkozy, un ami qui vous veut du bien.
Pendant ce temps-là…
Après son hommage, début juillet, à Jean Moulin dont il se disait être l’héritier (cf. RDA semaine du 3 juillet), jeudi, Emmanuel Macron participait, comme chaque année, aux traditionnelles commémorations de la libération de la ville de Bormes-les-Mimosas, dans le Var.
La presse a, dans l’ensemble, particulièrement mal relayé les propos du chef de l’État lors de cette cérémonie. Un discours pourtant extrêmement préoccupant au regard du fond philosophique et politique qu’il défend.
Fort heureusement, BFMacronie en assurait la retransmission intégrale… de quoi pouvoir vous en offrir une retranscription la plus complète possible.
Tout d’abord, tout au long de son discours, Emmanuel Macron s’est mis en tête d’établir un parallèle entre les jeunes soldats français de 1944 et la jeunesse de 2023.
Par exemple, quand le chef de l’État déclare : « Je pense tout particulièrement à nos enfants, à nos adolescents à peine moins âgés parfois que ces soldats d'Août 44. (…) [Comme ces] onze adolescents nés dans la même commune d'Algérie. Onze amis inséparables qui brûlaient tout simplement de s'engager. (…) Ces jeunes-là avaient l'amour de la patrie, une soif de dépassement, une volonté de donner un sens à leur vie et d'inscrire leur destin au cœur de la nation française. Et, je ne crois pas que cette soif-là, ce sens-là, y compris du sacrifice ultime, se soit perdu au fil des générations ».
Le pays est-il à nouveau menacé par la barbarie fasciste pour que le Président de la République aspire à retrouver dans la jeunesse française de 2023 la « soif » du « sacrifice ultime » ?
A quoi peut bien faire ici allusion Emmanuel Macron ?
Dans tous les cas, au besoin, le SNU peut déjà éventuellement commencer à rassasier les jeunes âmes les plus déshydratées.
Le chef de l’État, très en verve, continue sur sa lancée : « Il y a dans nos jeunes [de 2023] un appétit de liberté, un idéalisme qui se cherche parfois et auxquels nous devons répondre. Sans quoi, parfois, cette aspiration noble se retourne contre elle-même et sape les fondations de cette nation de liberté, d’égalité et de fraternité initiée en 1789, cette somme de destins emmêlés qui accroît la jeunesse française, génération après génération, fidèle à l’esprit des Lumières. Car hors de ce champ commun prospère la désunion, la division qui pave la voie du chaos et de l'injustice ».
Un discours en novlangue soutenue, indéniablement difficile à traduire en français.
En résumé, selon l’idée que s’en fait Emmanuel Macron, les jeunes ont, depuis toujours, la passion de la liberté, mais celle-ci peut parfois être si conséquente qu’elle finit par se retourner contre eux, provoquant alors désunion, division, chaos et injustice au sein de la société… jusqu’à remettre en cause l’héritage des Lumières et les fondations mêmes de notre nation construites autour des valeurs de 1789.
En bref, une vraie bouillie anachronique et paternaliste… qui ne mentionne même pas 1984.
Le chef de l’État poursuit son incroyable récit : « En cet été 1944, les libérateurs nous ont fait toucher du doigt une certaine idée de la liberté, individuelle et collective. Parce qu'ils l'ont exercée personnellement à son plus haut titre. Ils nous ont montré que la liberté individuelle s'accroît de ce qu'elle donne. Parce qu'ils étaient prêts à mourir pour la liberté collective, ils nous ont rappelé combien elle était vitale, humblement, héroïquement ».
Pas une allusion, en revanche, à la majorité de ces troupes issue des colonies en Afrique qui étaient elles aussi prêtes à mourir pour libérer la France… après avoir souvent été forcées de s’engager pour défendre la « mère-patrie ».
La liberté collective des uns ne s’arrêtant pas toujours où commence celles des autres.
Très inspiré ce jeudi, le chef de l’État était inarrêtable : « Sans phrase et sans écume, [les jeunes (volontaires) de 1944] nous ont montré que c’était là et que c’était cela, exercer sa liberté. Ça n’est pas une frénésie de transgression, ça n’est pas une fièvre de renverser les interdits. C’est d’abord et avant tout une volonté maîtrisée et forte capable d’assumer les contraintes qu’elle se choisit ».
Après plusieurs heures d’un travail acharné, cette revue d’actu est finalement heureuse de pouvoir vous proposer une traduction correcte de ce passage.
En somme, selon le chef de l’État, les jeunes qui se sont engagés pour libérer la Provence en 1944 ont exercé leur liberté, tandis que les jeunes de 2023 la transgresse, préférant renverser les interdits. En un mot, en s’attaquant aux libertés collectives, ces derniers ne sont plus en mesure d’assumer la responsabilité qui incombe à leur liberté individuelle.
Comprendre qu’il va falloir leur rappeler deux ou trois choses pour qu'ils puissent continuer à en jouir pleinement.
Un discours digne d’un Maréchal !
C’est sûrement d’ailleurs la raison pour laquelle Emmanuel Macron ajoute dans la foulée : « Et cette liberté-là, qui n'existe que parce qu'elle est toujours et d'abord collective, les droits qui s'ensuivent, qui ne sont là que parce qu'il y avait d'abord des devoirs, c'est ce dont nous voulons ; nous devons nourrir nos jeunes générations. Car c'est bien avec ce sens de l'idéal ancré au fondement de notre nation et de notre République que nous savons faire les plus grandes choses ».
Que chacun veuille bien pardonner la traduction approximative qui va suivre, mais le niveau linguistique du Président est tel que même Champollion en aurait mangé son papy-russe.
A priori, il ressort de ce passage que le chef de l’État considère que la liberté individuelle dépend d’abord des libertés collectives. Jusqu’ici le débat est ouvert, mais là où le Président dérape considérablement sur son interprétation de l’Histoire, c’est lorsqu’il estime qu’un individu dispose de droits avant tout parce qu’il aurait d’abord accepté de se soumettre à des devoirs.
Or, ne serait-ce pas précisément l’absence de droits qui a toujours permis d’imposer aux individus une multitude de « devoirs » non-consentis ?
Un homme libre a-t-il un seul autre devoir que celui qu’il souhaite s’imposer à lui-même, que ce soit par respect du contrat social auquel il souscrit ou par philosophie ?
Quel message subliminal le Président essaie-t-il de délivrer ici ? À quels devoirs particuliers songe-t-il ? Et, surtout, en évoquant les fondements de notre régime politique, se souvient-il du contenu exact de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, justement rédigée en 1789, dans laquelle le mot « droit » est inscrit seize fois, et où « devoirs » n’apparaît, lui, qu’une seule fois… en préambule ?
Un préambule que le Président gagnerait à relire, puisque dès sa première phrase, celui-ci rappelle un élément essentiel au bon exercice du pouvoir : « Les Représentants du Peuple Français, constitués en Assemblée Nationale, considèr[e]nt que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des Gouvernements ».
Cette phrase serait – paraît-il – le passage préféré d’Anticor, l’organisation de lutte contre la corruption en France qui a récemment été désarmée par la macronie. (cf. RDA semaine du 19 juin).
Autre sujet, autre polémique, autres membres de l’exécutif.
Quand « un été n[‘est] pas caniculaire – en somme, un été à peu près comme celui de 2023 », selon France Info ; quand une « canipull » s’est imposée sur une large moitié nord du pays, selon MSN ; forcément, lorsqu’une vague de chaleur déferle (enfin) sur l’ensemble du territoire… c’est tout le noyau dur du gouvernement qui en profite pour faire sa rentrée politique !
Jeudi, la Nouvelle République nous avertissait ainsi « [qu’]avant une semaine de chaleur intense, la première ministre Élisabeth Borne a activé jeudi 17 août 2023 une cellule interministérielle de crise ». Le quotidien précise que « ses homologues des principaux ministères (Intérieur, Santé, Solidarités, Agriculture, Transports) y ont participé, ainsi que les préfets et les services des départements concernés ».
Du coté du nouveau ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, le ton se voulait d’ailleurs grave. Au nom du gouvernement, il l’assure : « nous ne déclenchons jamais les alertes à la légère ».
Un ministre qui n’a visiblement pas dû vivre en France entre 2020 et 2022.
À l’issue de la réunion de cette cellule « de crise », une (toute) petite mesure a été entérinée. La Nouvelle République explique que « le gouvernement a annoncé qu’un numéro vert 'Canicule info service' serait [comme en 2019 et 2022] actif à partir du vendredi 18 août. Ce numéro sera joignable de 9 h à 19 h au 0800 06 66 66 ».
En d’autres termes, dès ses premiers pas, cette cellule de crise nous a offert un numéro (de communication) infernal.
MONDE
Mercredi, Le Monde s’intéressait au feuilleton de l’été : le changement de pouvoir politique au Niger, où la FrançAfrique a un temps laissé penser qu’elle envisageait, au moins de manière maladroite, de défendre ses intérêts en délogeant par la force les putschistes.
Le quotidien nous apprend que, cette semaine, la situation s’est encore davantage compliquée pour les intérêts français puisque « l’Union africaine [a] rejet[é] toute intervention militaire et se désolidarise de la Cede[f]ao », la Communauté économique des États de la FrançAfrique de l'Ouest.
Le journal précise qu’à « l’issue d’une réunion “tendue” et “interminable”, selon des diplomates, le CPS, organe chargé de statuer sur les questions de règlement des conflits, a refusé l’usage de la force ».
Un refus qui, précise le journal, « affaiblit considérablement l’organisation ouest-[franç]africaine » qui, « même si elle continue à privilégier le “dialogue”, a [malgré tout] ordonné “l’activation immédiate de [sa] force en attente” ».
Cette position de l’Union Africaine est « d’autant plus surprenante » aux yeux du Monde « qu’elle va à l’encontre des us et coutume de l’UA, qui a pour habitude de s’aligner sur les positions des organisations régionales. Elle contredit aussi le président de la commission de l’UA, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, qui avait affirmé “son ferme soutien aux décisions de la Cede[f]ao”, dans un communiqué du 11 août ».
Le quotidien ajoute que « “le CPS s’est rarement retrouvé aussi divisé”, [selon] un diplomate de l’UA, (…) [lorsque] le 14 août, le bloc de [la Franç]Afrique de l’Ouest (représenté par le Sénégal, la Gambie, le Ghana, le Nigeria) s’est retrouvé isolé au moment de plaider pour l’option armée, les quatre autres blocs continentaux s’y sont vigoureusement opposés, à l’initiative d’Evariste Ndayishimiye, président du Burundi, qui préside l’instance au mois d’août ».
Le Burundi, ce pays qui, pour rappel, dans son histoire récente, s'est systématiquement abstenu, quand il ne votait pas ouvertement contre toute résolution à l’ONU pouvant porter atteintes aux intérêts russes. Un pays africain, où il y a plus de deux mois, le président remerciait ouvertement « la Russie pour son appui aux différents secteurs de la vie nationale et particulièrement pour avoir défendu le Burundi au moment où il subissait des sanctions injustes de l’Occident ».
Par ailleurs, si l’Afrique de l’Ouest reste une zone dans laquelle la France aime jouer au jeu du chat et de la souris avec la Russie, il ne faut pas oublier qu’il existe un autre acteur majeur, dont l’influence ne cesse de croître sur le continent : la Chine.
En parallèle, Français et Américains sont, eux, peu à peu expulsés d’Afrique de l’Ouest… enfin, les Français surtout, puisque dimanche dernier Le Figaro nous apprenait que « la France crai[gnai]t d’être doublée par son allié américain ».
Le quotidien explique que « les États-Unis se sont montrés très présents depuis la crise au Niger. Trop présents même, quand la numéro trois de la diplomatie américaine, Victoria Nuland, s’est assise à la table des putschistes le 7 août dernier ».
Le journal précise que « Victoria Nuland - célèbre en Europe pour son “Fuck the EU” prononcé en Ukraine en 2014 - avait préalablement conditionné sa venue à une rencontre avec le président Bazoum. [Et pourtant,] le refus des putschistes n’a finalement pas entravé sa visite ».
Un diplomate français confie au Figaro que, dans cette affaire, « l’objectif des Américains est simple : conserver leurs bases. (…) Si pour cela il faut tirer un trait sur le retour à la légalité constitutionnelle [du pouvoir en place], ils n’hésiteront pas. Les militaires nigériens ne poseront probablement pas de problème d’ailleurs: ils savent que sans les capacités de surveillance américaines, tous leurs efforts pour combattre les djihadistes sont vains ».
Au final, une source du journal estime « [qu’]avec des alliés comme ça, on n’a pas besoin d’ennemis », puisque les Américains « ont fait tout le contraire de ce qu’on pensait qu’ils feraient ».
Le Figaro remarque également que « les Américains ne sont pas les seuls à se démarquer de la ligne française. Pour l’heure, aucun des alliés de la France présents au Niger - l’Allemagne, la Belgique, l’Italie - n’a remis en question la légitimité des exigences des autorités militaires nigériennes, notamment quand ils demandent le départ des troupes françaises ».
En un mot, là encore, « avec [une Union européenne] comme ça, on n’a pas besoin d’ennemis ».
Toujours est-il qu’après les revers politiques subis par la Cédéfao au Sénat nigérian (cf. RDA de la semaine dernière) et lors de ce congrès de l’Union Africaine, mais aussi en tenant compte du double jeu américain, mêlé au mutisme européen, il faut bien se rendre à l’évidence du côté de Paris, tout ceci cumulé, rend de plus en plus improbable une intervention militaire françafricaine au Niger.
Au final, alors qu’aucun service de renseignement américain n’a eu suffisamment de vista pour empêcher ce coup d’État, trois semaines plus tard, on reste également sans explication sur ce qui a retenu la France de le tuer elle-même dans l’œuf… puisque, comme évoqué les semaines dernière et précédente, selon des sources internes aux services de renseignement extérieur français, dont les propos étaient relayés, le 4 août, par le grand reporter au Figaro, Georges Malbrunot, « quelques heures avant le coup d’état, la DGSE a conseillé au pouvoir français d’installer des membres des forces spéciales au palais présidentiel à Niamey, mais la réponse a été : “Non, ça va être interprété comme du colonialisme. On ne peut pas rester dans la Françafrique" ».
Une promesse de sortir de la FrançAfrique faite par Emmanuel Macron qui ne date d'ailleurs pas de ce mois d'août.
Dès mars dernier, lors d’un passage au Gabon, France Info relevait que le chef de l’État, « accusé, avec cette visite, de soutenir indirectement le président sortant, Ali Bongo, candidat à sa réélection cette année, s'est vivement défendu : "Je ne suis venu investir personne. Je ne suis venu témoigner que mon amitié et ma considération à un pays et un peuple frère", s'est-il justifié, après avoir assuré que l'ère de la "Françafrique" était "révolue" ».
Force est de constater qu’en refusant aux forces spéciales d’intervenir en amont du coup d’État au Niger, la macronie a fait ce qu’elle avait annoncé en empêchant ce pays de « rester dans la Françafrique ». Russie et Chine s’en frottent déjà les mains.
À qui le tour ensuite ?
En attendant de connaître la fin de ce feuilleton de l’été, hier, samedi, l’AFP nous donnait déjà les grandes lignes du prochain épisode, en nous annonçant qu’une « délégation ouest-[franç]africaine est arrivée [ce samedi] à Niamey afin de tenter une nouvelle médiation diplomatique avec les militaires qui ont pris le pouvoir au Niger ».
En parallèle, la junte montrait, elle, qu’elle répondrait par la force à toute agression de la Cédé[f]ao. En ce sens, le média digital Anonyme Citoyen observait, ce même samedi, que « des milliers de jeunes volontaires s'enrôlent [actuellement] dans l'armée au Niger pour défendre le pays en cas d'une éventuelle intervention militaire de la Cede[f]ao ».
Mieux, Cameroun 24 nous apprenait le même jour que la TsarAfrique, via « le Burkina Faso et le Mali, [a même] déployé des avions de combat au Niger ».
Le média camerounais explique que « des officiers des états-majors du Mali, du Burkina Faso et du Niger se sont réunis à Niamey "pour finaliser un plan visant à repousser l'agression illégale de la part de la Communauté économique des États de [la Franç]Afrique de l'Ouest" ».
Un feuilleton qui tient, au final, plutôt la route. Une intrigue bien ficelée. Des personnages forts. Et, surtout, la promesse bien entretenue d’un potentiel climax digne des plus grands films d’action… alors qu’il ne s’agit pourtant que d’une guerre à petits budgets.
Rendez-vous donc la semaine prochaine pour un nouvel épisode de : Querelles russo-sino-occidentales en terres françafricaines.
Autre culture, autre thème de prédilection, autre préoccupation.
Samedi, The Telegraph nous révélait qu’en Allemagne, « la nouvelle loi sur les lanceurs d'alerte "risque de faire revenir le pays à l'ère de la Stasi" ».
Le journal britannique souligne que « l’Allemagne construit discrètement un "énorme appareil de surveillance" qui risque de créer une culture de dénonciation similaire à celles des nazis et de la Stasi, selon Hubertus Knabe, l'un des principaux historiens du pays ».
The Telegraph explique que « la "loi allemande sur la protection des lanceurs d'alerte" est entrée en vigueur en juillet dans le but déclaré de protéger les personnes qui signalent des abus sur le lieu de travail. (…) Mais, selon l'homme qui a dirigé pendant près de deux décennies le Mémorial de Hohenschönhausen sur le site de la prison politique de la Stasi à Berlin, la loi va plus loin que la simple protection des lanceurs d'alerte. "Les points de dénonciation ne traiteront pas seulement des soupçons de criminalité, ils traiteront également des délits passibles d'amendes" ».
En somme, l’historien allemand considère que cette loi ressemble à « l'exemple de l'Allemagne nazie où les Allemands ont dénoncé avec ferveur leurs voisins souvent "pour un avantage personnel ou pour se venger" ». Hubertus Knabe en conclue que la mise en application de cette loi va engendrer une « atmosphère de peur similaire à celle observée au sein des dictatures ».
La Nostalgie Kamarad !
ÉCONOMIE
Mercredi, Les Échos nous révélaient que « la Russie [encore elle !] mis[ait] sur le rouble numérique pour contrer les sanctions internationales ». Le quotidien économique dénombre actuellement une « dizaine de banques russes [qui] teste pour la première fois l'utilisation de portefeuilles électroniques pour réaliser des transferts et des paiements en rouble numérique ».
Cette monnaie numérique doit notamment servir à faciliter les échanges bancaires en dehors du pays pour les « établissements russes déconnectés de Swift, le système interbancaire international qui permet de simplifier les transferts de fonds transfrontaliers ».
En d’autres termes, grâce aux sanctions prises contre son pays, Vladimir Ier a pu accélérer l’instauration de sa nouvelle monnaie numérique.
Spassiba l’Occident !
Le journal explique que ce « rouble numérique fait partie des CBDC (“central bank digital currency” ou “monnaie numérique de banque centrale”) : il se différencie des cryptomonnaies classiques, décentralisées, comme le bitcoin, par le fait qu'il est émis directement par la BCR [banque centrale russe] ».
Le journal économique observe également que toutes les plus grandes puissances monétaires semblent toutes raccord sur le sujet, puisqu’entre « euro numérique, dollar numérique, yuan numérique… les projets de CBDC sont dans les tuyaux de nombreuses autres grandes banques centrales. (…) En Europe, en Chine ou en Russie, le but affiché est de réaliser des paiements plus sûrs et d'améliorer l'efficacité des transactions financières ».
Autrement dit, si les transactions financières réalisées par le citoyen moyen avec de l’argent liquide, des bitcoins et autres cryptomonnaies classiques échappent encore au contrôle des banques centrales (et privées) ainsi qu’aux États, avec les CBDC (en français, MNBC), il n’en existera bientôt plus aucune qui soit en mesure de se soustraire à la surveillance étatico-bancaire.
Avec une omniscience et un pouvoir d’action total de l’État sur chaque transaction financière, tout achat (non payé en argent liquide) jugé contraire aux injonctions gouvernementales pourraient ainsi facilement être identifié, puis sanctionné… là où une banque privée est normalement censée assurer protection et confidentialité à ses clients.
« Normalement » car récemment il n’y a pas eu besoin de MNBC, mais d’un simple état d’urgence, pour voir des comptes en banque de Canadiens être gelés en raison de leur soutien au « Convoi de la liberté », un puissant mouvement de contestation aux mesures restrictives adoptées par le Premier Ministre, Justin Trudeau.
À cette époque, tous ceux qui n’avaient pas eu la clairvoyance de mettre un peu d’argent (liquide) sous le matelas s’étaient alors retrouvés, du jour au lendemain, démunis, sans un sou.
Un avant-goût de ce que l’usage des MNBC pourrait apporter à grande échelle à un gouvernement à tendance totalitaire… comme celui de Justin Trudeau.
Comment ne pas non plus se souvenir qu’en France, un rapport d’information du Sénat, paru début juin 2021, en pleine hystérie collective autour de la pandémie de Covid, suggérait que « dans les situations de crise les plus extrêmes, les outils numériques pourraient permettre d'exercer un contrôle effectif, exhaustif et en temps réel du respect des restrictions par la population, assorti le cas échéant de sanctions dissuasives, et fondé sur une exploitation des données personnelles encore plus dérogatoire » ?
Un rapport qui proposait justement un « contrôle des transactions permettant par exemple d'imposer une amende automatique, de détecter un achat à caractère médical (pouvant suggérer soit une contamination, soit un acte de contrebande en période de pénurie), ou encore la poursuite illégale d'une activité professionnelle (commerce, etc.) en dépit des restrictions ».
Des préconisations sénatoriales taillées sur mesure pour les MNBC, qu’il suffirait simplement d’appuyer en interdisant l’usage d’argent liquide « dans les situations de crise » – comme cela a déjà été observé dans certains magasins lors de l’épidémie de Covid – pour définitivement s’assurer d’une surveillance et d’un contrôle absolu et total sur chaque transaction financière, y compris sur celles qui se chiffrent en centimes.
Concrètement, sur la base de ce rapport sénatorial et au regard du mode de fonctionnement des MNBC, si, demain, en pleine épidémie, comme ce fut le cas en 2020, un incompréhensible décret venait subitement interdire la vente de masques pour le grand public – alors que la majorité de la population venait à en réclamer – et que vous décidiez, vous, tout de même de vous en procurer, alors le gouvernement le saurait immédiatement et pourrait vous sanctionner s’il le juge nécessaire.
Autre exemple, vous décidez de vous payer un aller-retour à Marseille pour visiter un obscur chaman, connu sous le nom de Didier R., qui dit pouvoir traiter vos symptômes… même sanction !
Pire encore, après l’avoir consulté, vous vous rendez ensuite coupable de l’achat à la pharmacie de deux boîtes de Plaquenil… l’issue risque d’être une nouvelle fois la même, le gouvernement le verra instantanément, et pourra même, en amont, imposer à ses algorithmes de s’opposer à la réalisation de tous types de transaction financière médicalement prohibée.
L’idée est tellement bonne d’un point de vue sécuritaire qu’il pourrait même être envisageable de l’étendre – uniquement en cas de crise grave bien évidemment – à tout acte d’opposition politique et de presse libre, c’est-à-dire de « complotisme », afin qu’ils puissent, eux aussi, être assujettis au même genre de sanctions.
Voilà qui aurait au moins pour effet de drastiquement limiter le nombre d’informations en circulation susceptibles d’affaiblir les bienveillantes injonctions gouvernementales.
Sans se projeter aussi loin, Les Échos notent tout de même que, selon Bloomberg, si « les défenseurs de ces monnaies affirment qu'elles facilitent la fourniture de services bancaires aux groupes sociaux mal desservis, augmentent l'efficacité des paiements et réduisent les coûts de transaction, (…) les sceptiques mettent en garde contre les problèmes de protection de la vie privée et les risques de sécurité liés aux cyberattaques ».
Et, pour renforcer encore davantage cette sécurité, rappelons que World Coin, la monnaie numérique de Sam Altman, le créateur de ChatGPT, oblige ses utilisateurs à se soumettre à une reconnaissance biométrique en scannant leur iris (cf. RDA du 24 juillet).
Un monde de surveillance et de contrôle financier qui ne se limite pas qu’à la cryptomonnaie puisque, mardi, Anonyme Citoyen nous apprenait que « le gouvernement a publié fin juillet un décret autorisant la création d'un traitement de données à caractère personnel qui recourt à un système de reconnaissance faciale, pour vérifier que les retraités résidant à l'étranger sont toujours en vie pour lutter contre la fraude ».
Le nom de ce nouveau joujou dystopique ? « Contrôle dématérialisé de l’existence ».
De la novlangue, certes déshumanisée, mais qui, à la différence du discours de Bormes-les-Mimosas, a le mérite d’être plus sobre et explicite.
En parlant de ChatGPT, mercredi, La Provence nous apprenait que « OpenAI, l'éditeur de [l’intelligence artificielle], annonce que sa technologie pourrait servir de base à de nouveaux outils automatisés de modération de contenus sur Internet. Son langage multimodal GPT-4 pourrait ainsi permettre d'aboutir à une modération plus rapide, cohérente et saine que ce qui est aujourd'hui réalisé par une armée de modérateurs humains ».
Une armée de modérateurs… mais aussi de censeurs.
Le quotidien provençal se montre d’ailleurs plutôt enthousiaste à l’annonce de cette nouvelle en expliquant que « si cette tâche devait être automatisée, elle soulagerait énormément de monde. Et, comme ce type de programmation a encore ses limites, les résultats devront de toute manière être soigneusement contrôlés, in fine validés voire affinés en maintenant des humains dans la boucle ».
Nous voilà rassurés, sous prétexte qu’un contenu désinforme, il ne s’agira pas non plus de censurer tout et n’importe qui… Olivier Véran doit être soulagé.
Pour conclure, La Provence souligne « que cette activité pourrait aussi représenter une nouvelle source [inespérée] de revenu pour OpenAI, que certains médias annoncent en grande difficulté financière, avec un nombre d'utilisateurs en baisse cet été et des dépenses énormes, estimées à plus de 700 000 dollars par jour ».
La Provence semble oublier d’incorporer un élément à son analyse : aspirer les données, les travaux et les réflexions du citoyen moyen n’a pas de prix pour un éditeur d’IA.
Autre sujet économique traité par la presse cette semaine, celui de la hausse fulgurante des carburants au cours du mois d’août. Mercredi, BFMTV envoyait donc sa reporter, Aurore Villemur, dans une station d’essence parisienne pour relever les prix à la pompe.
La journaliste annonce « 1,98 le prix au litre du gazole », avant d’expliquer que « c'est le carburant qui a le plus augmenté ces dernières semaines, avec une augmentation d'environ 17 centimes le litre depuis le début du mois de juillet ». Aurore Villemur ajoute que « pour ce qui est du sans plomb 95 et du sans plomb 98, là, la barre des deux euros est franchie. Ils sont respectivement à 2,04 et 2,26 le litre ».
De son côté, France Info, qui s’appuie sur un reportage de France 3, constate que, face à cette flambée des prix, les « automobilistes [sont désormais] résignés, obligés de s'adapter ».
Selon un touriste interrogé par la chaîne du service public, « même si on a envie d'être un peu plus vertueux et qu'on se dit “je vais essayer d'y aller par le train”, on se rend compte que le train reste encore très cher. Donc on prend la voiture et on n'a pas d'autre choix que de faire avec l'augmentation des carburants ».
Pour un autre automobiliste, cette augmentation « est un peu une fatalité. On s'organise en fonction, mais à un moment donné, ça va bloquer. Les gens ne pourront plus se permettre de mener le train de vie qu'ils mènent aujourd'hui ».
Être de moins en moins libre de se déplacer, notamment à cause d’un budget de plus en plus serré est une tendance persistante en France depuis 2020, voire 2018 et les Gilets Jaunes.
Autre élément économique amenant « les gens » à ne « plus se permettre de mener le train de vie qu’ils mènent aujourd’hui » : l’inflation, qui ne cesse d’amaigrir le porte-monnaie des Français.
Michel Biero, le directeur des achats et marketing de Lidl se montrait, à ce sujet, particulièrement pessimiste. Invité jeudi par BFMTV, le responsable de l’enseigne nous alertait : si « cette inflation ralentit un petit peu, elle reste [néanmoins] très élevée. Elle est de plus de 20 %. Je le dis souvent sur les antennes, il ne faut pas vendre du rêve aux Français. On ne reviendra pas, en aucun cas, sur les prix d'avant crise ».
Michel Biero explique « qu’aujourd'hui, (…) ceux qui vont batailler, ce sont les distributeurs. Il y a une déconsommation, [donc] chaque distributeur se doit de récupérer les consommateurs (…) chez lui. On va batailler très fortement sur le prix, [et] les prix vont baisser légèrement, mais ce ne sera pas grâce aux industriels ou aux multinationales (…). Ce sera parce que [nous] les distributeurs, on va prendre sur nos marges. Ça fait un an qu'on le fait. On va continuer à le faire ».
Le responsable de Lidl « demande de la transparence et pense qu'ensemble, on peut faire baisser les prix ». En attendant que ce doux espoir… ne disparaisse, Michel Biero estime qu’en septembre, avec cette âpre lutte commerciale qui s’annonce entre lui et ses concurrents, il y aura bien « des baisses [de prix, mais] assez minimes, de 5 à 10 %, pas plus »
Si, jour après jour, nombreux sont les Français à en réalité éprouver de plus en plus de mal à pouvoir « se permettre de mener le train de vie qu’ils mèn[ai]ent [hier] », ce n’est toutefois pas le cas de chacun d’entre eux… puisque, en parallèle, mardi, Les Échos relevaient « [qu’]avec 2.821.000 d'adultes ayant une fortune supérieure à 1 million de dollars, l'Hexagone se positionne en troisième position mondiale derrière les États-Unis et la Chine, selon le Global Wealth Report publié mardi par UBS ».
Joli score pour ce petit pays de moins de 70 millions d’habitants.
Les Échos remarquent d’ailleurs que « le développement de la France contraste avec l'évolution du nombre total de millionnaires dans le monde, passé de 62,9 à 59,4 millions entre 2021 et 2022 ».
Pour Raphaël Pradeau, membre d’Attac, interrogé par L’Humanité, cette hausse du nombre de millionnaires en France est surtout « la conséquence logique de la politique de Macron ». Un nombre qui, selon L’Huma, devrait même pouvoir grimper jusqu’à quatre millions d’individus d’ici 2027.
Depuis le temps que tout le monde le répète, voilà une nouvelle preuve que le modèle social français – unique au monde – redistribue beaucoup (trop) de ses richesses… aux plus aisés.
Mardi, Bloomberg s’attardait justement sur l’une de ces personnalités particulièrement aisées qui, elle, assume pleinement de moins redistribuer son argent.
Le média économique nous révèle ainsi que « [l’]Open Society Foundations (OSF), l'organisation philanthropique qui contrôle la plupart des actifs de 25 milliards de dollars de George Soros, devrait mettre fin à une grande partie de ses opérations dans l'Union européenne dans le cadre d'un repli sous une nouvelle direction ».
Bloomberg explique que « Soros, 93 ans, a cédé le contrôle d'OSF à son fils, Alexander Soros, en décembre, et il a ensuite annoncé une réduction des effectifs d'au moins 40 % à la fondation ».
Pour Fortune, qui s’intéressait déjà au sujet début juillet, cette « organisation, qui donne de l'argent à diverses causes, notamment le changement climatique et les initiatives pour l'égalité, a confirmé à Fortune (…) que ces changements incluaient la "décision difficile" de supprimer près de la moitié de ses effectifs ».
Un porte-parole d’OSF explique que « la mise en œuvre du nouveau modèle implique une rationalisation supplémentaire de [l’]organisation actuelle, une refonte et un réoutillage des opérations existantes ».
Fortune ajoute que « le conseil d'administration [de l'organisation] s'attend à ce que ce nouveau modèle crée une culture “d'opportunisme stratégique” au sein des fondations et parmi les bénéficiaires qu'elles soutiennent. Ce nouveau modèle proposé favorisera à la fois les approches de “capital patient “ à plus long terme et les besoins tactiques à court terme ».
Au passage, Fortune rappelle que « Soros (…) est un partisan connu du Parti démocrate et des mouvements libéraux, qui l'a vu devenir une cible politique de longue date de l'extrême droite et l'a placé au centre de plusieurs théories du complot infondées ».
Des théories aussi infondées que celle visant à laisser penser que Soros ne serait que la cible politique de l’extrême-droite ou d’antisémites ?
De retour avec la plèbe : Anonyme Citoyen annonçait, samedi, que « selon une étude du Fonds Monétaire International (FMI), la principale cause de l'inflation en Europe depuis 2022 est due à la hausse des profits des entreprises ».
Enfin, pas de n’importe quelles entreprises non plus, puisque si sur la scène économique mondiale les multinationales se partagent allègrement le gros des profits, d’autres entreprises aux tailles moins conséquentes tentent, elles, surtout d’éviter faillites et défaillances.
À ce titre, jeudi, Libération remarquait qu’en « un an, près de 50 000 entreprises ont fait faillite en France ». Libé souligne que, « sans relâche, les coups sur l’économie s’enchaînent depuis trois ans. Les confinements liés à la pandémie d’abord. La guerre déclenchée par la Russie en Ukraine l’an dernier, qui, conjuguée à la forte reprise post-Covid et aux difficultés d’approvisionnement, a propulsé l’inflation à des taux inconnus depuis quarante ans ».
Le quotidien veut néanmoins rester positif et note que « le tissu économique n’est pourtant pas dépecé. Le rattrapage des faillites qui n’avaient pas eu lieu pendant la crise sanitaire, redouté lorsque les perfusions d’aides publiques seraient débranchées et les facilités de paiement cesseraient, n’a pas eu lieu ».
Libération est toutefois forcé d’admettre que « certains secteurs sont davantage touchés par les défaillances qu’avant les crises successives. Celui de l’hébergement et de la restauration, affecté par la pandémie et beaucoup soutenu par le “quoi qu’il en coûte”, enregistre près de 7 000 faillites en juillet sur douze mois, soit un bond de 70 % sur un an (...). Celui de l’industrie, alors que les “réussites” de la réindustrialisation sont vantées à longueur de discours gouvernemental, n’est pas épargné. Près de 3 700 ont été constatées en juillet en cumulé, en hausse de 53 % sur un an ».
Même constat concernant les entreprises européennes, puisque, le même jour, l’Opinion observait que, « d’après Eurostat, ce deuxième trimestre [2023] a vu les faillites d’entreprises européennes retrouver leur niveau de 2015 ».
Le journal ajoute que « c’est la sixième fois consécutive que cette donnée trimestrielle augmente à l'échelle européenne, et “tous les secteurs de l'économie ont enregistré des augmentations du nombre de faillites au deuxième trimestre 2023 par rapport au trimestre précédent”, [selon] l’organe de statistique de la Commission européenne ».
Et, là encore, « les secteurs les plus touchés sont celui de l’hébergement et la restauration, qui subit presque 24 % de faillites supplémentaires par rapport au trimestre précédent ».
En résumé, cette semaine, carburant et tickets de train sont hors de prix. Les multinationales et autres grands industriels continuent d’engranger des profits gargantuesques. Le nombre de millionnaires grandit… beaucoup moins vite que celui du nombre de pauvres. Et, l’offre en hôtellerie et restauration chute dans des proportions importantes/inquiétantes.
En un mot, Davos applaudit.
MÉDIAS
Vendredi, Libération nous annonçait que « les locaux de la rédaction du quotidien l’Humanité, situés à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), ont été cambriolés jeudi 17 août matin ».
Libé indique que « les auteurs, vêtus de tenues d’ouvriers, ont cassé une vitre située au rez-de-chaussée pour pénétrer dans l’immeuble de cinq étages abritant plusieurs entreprises ».
« Une cinquantaine d’ordinateurs ont été volés ainsi que du matériel vidéo et des téléphones portables », ajoute Libération qui relaie les déclarations du parquet de Bobigny précisant que « tous les étages comportant différentes sociétés ont été visés ».
Des voleurs en tenue d’ouvriers qui cambriolent L’Huma, ça ne s’invente pas !
DIVERS
Cette semaine, la Fondation Mozilla nous appelait à signer « la pétition pour empêcher la France d’obliger les navigateurs tels que Firefox de Mozilla à censurer des sites web ».
La fondation Mozilla explique que « le gouvernement français prépare une loi qui pourrait menacer la liberté sur Internet. Le projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (SREN) obligerait les navigateurs web, comme Firefox de Mozilla, à bloquer des sites web directement au niveau du navigateur ».
Le texte prévient que « cette mesure créerait un dangereux précédent et servirait de modèle à d’autres gouvernements pour à leur tour transformer les navigateurs en outils de censure gouvernementale »
Encore un projet de loi empli de bonnes intentions… mais qui pose tout de même une petite question qui devrait plaire au Président : eu égard aux incessantes atteintes aux libertés collectives (et individuelles) observées en France depuis plus de six ans, quelle réaction aurait eu les jeunes de 1944 face à la macronie ?
Et ceux de 1789, voire de 1792 ?
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Wolf Wagner, journaliste indépendant pour France-Soir
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