Sécurité aérienne et sécurité des produits pharmaceutiques : deux poids, deux mesures
TRIBUNE - Lorsqu'un constructeur aéronautique développe un nouveau modèle d'avion, cela prend plusieurs années de recherches et de tests. Lorsque le nouveau modèle commence à être mis en service, les moindres incidents sont détectés, reportés, analysés. S'il le faut, tous les exemplaires de ce modèle à travers le monde sont immobilisés pour procéder à des vérifications ou des ajustements nécessaires. Et il n'est pas question d'y opposer des enjeux économiques ni financiers ; la sécurité n'a pas de prix, surtout quand il s'agit des conséquences d'une invention humaine. Dans le pire des cas, un crash aérien fait la "une" de tous les journaux, et toute la population s'en émeut. Une cellule psychologique est immédiatement mise en place pour venir en aide aux victimes ou leurs familles. La cause de l'accident est recherchée jusqu'à être parfaitement identifiée. La compagnie aérienne dédommage les victimes à hauteur de plusieurs centaines de milliers d'euros chacune, et des poursuites pénales sont engagées afin de déterminer les responsabilités des différentes personnes physiques et morales impliquées dans l’accident.
Imaginons à présent qu'un constructeur aéronautique vienne de livrer son tout dernier modèle d'avion, équipé d'une technologie jamais utilisée sur un aéronef, et développée en moins d'un an. Appelons-le par exemple le PAMJ-19.
Imaginons que les organismes chargés de la sécurité aérienne autorisent l'utilisation du PAMJ-19 et ce, avant la fin des tests de sécurité habituellement requis, et sans mobiliser aucun moyen de contrôle ni de suivi particulier liés à cette situation exceptionnelle.
Imaginons que les Etats obligent toutes les compagnies aériennes à ne désormais utiliser que le PAMJ-19.
Imaginons que les Etats interdisent désormais à la population de se déplacer en train, jugé subitement peu efficient et trop dangereux, et obligent tous les citoyens de plus de douze ans à effectuer au moins un vol tous les six mois dans le PAMJ-19, qu'ils aient besoin ou non de se déplacer.
Imaginons que les Etats persécutent ceux qui refusent de monter dans le PAMJ-19, en leur supprimant des libertés fondamentales telles que celles de se déplacer librement ou de travailler.
Imaginons que des pilotes ou des ingénieurs expérimentés qui signalent des problèmes de sécurité sur le PAMJ-19 soient publiquement discrédités puis persécutés par leurs autorités de tutelle jusqu'à être démis de leurs fonctions.
Imaginons qu'au bout de deux ans, plusieurs centaines de ces avions PAMJ-19 se soient écrasés à travers le monde, faisant des dizaines de milliers de victimes.
Imaginons que les Etats et leurs services nient les accidents et imposent une censure dans les médias traditionnels et numériques à l'égard de toute information qui mettrait en doute la fiabilité du PAMJ-19.
Imaginons que les principaux médias, au lieu de dénoncer ces accidents, continuent à faire la promotion de ce nouvel appareil PAMJ-19 comme si rien n'était jamais arrivé.
Quelle société pourrait accepter de tels abus sans se révolter ?
Imaginons que, lorsque des preuves flagrantes de certains accidents ne peuvent plus être masquées, les représentants de l'Etat les minimisent et insistent sur le fait qu'il faut continuer à utiliser le PAMJ-19 parce qu'il est occasionnellement utilisé pour des évacuations sanitaires, et qu'il sauve donc des vies.
Imaginons que, lorsque des familles demandes une expertise des victimes sur le site d'un crash, les experts et avocats mandatés par les autorités concluent que les passagers sont tous morts d'un arrêt cardio-respiratoire, dont on ne peut pas exclure qu'il soit antérieur de quelques secondes au crash.
Imaginons que, grâce à la persévérance des victimes ou de leurs familles, quelques décès ou des blessures soient reconnus comme ayant été directement causés par le crash du PAMJ-19, mais que l'Etat ne les indemnise qu'à hauteur de quelques milliers d'euros, et ne leur offre aucune prise en charge psychologique, sociale ou médicale.
Imaginons enfin que le constructeur, qui a gagné des dizaines de milliards d'euros avec la vente de ses avions défectueux, ne soit jamais inquiété, ne paie aucune indemnité aux victimes, ni aucune amende aux Etats.
Tout cela n'est heureusement que fiction et semble hautement irréaliste. Quel Etat oserait mettre aussi ouvertement en danger la vie de ses citoyens ? Quelle société pourrait accepter, sans de révolter, de tels abus de la part de ses autorités, de ses journalistes, et de ses opérateurs économiques ?
Ingénieur de formation, Nicolas Laurent travaille depuis une dizaine d’années dans le milieu associatif et la protection de l’environnement sur l'île de La Réunion. Comme de nombreux citoyens, il a été sidéré, depuis le début de la crise Covid, par l'effondrement brutal des valeurs de nos démocraties occidentales. Il s’est donc joint à plusieurs collectifs et associations visant à rétablir le respect de certains droits fondamentaux.
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