"Penelopegate" : le point sur l'enquête qui fragilise Fillon
De son épouse Penelope à ses enfants Marie et Charles, le point sur les investigations qui fragilisent le candidat de la droite à la présidentielle François Fillon désormais visé par une information judiciaire, confiée à trois juges d'instruction.
- Penelope à l'Assemblée -
L'information judiciaire ouverte vendredi par le parquet national financier (PNF) après un mois d'investigations sous sa propre autorité vise d'abord un éventuel détournement de fonds publics.
Au cœur de l'affaire, les postes occupés par Penelope Fillon comme assistante parlementaire de son mari et de son ancien suppléant, Marc Joulaud, à l'Assemblée nationale. Sur environ quinze ans, de 1986 à 2013 avec plusieurs interruptions, elle a perçu 680.380 euros net.
Rien n'interdit à un parlementaire d'embaucher un membre de sa famille, mais ces emplois étaient-ils réels? Le salaire était "parfaitement justifié", a assuré François Fillon. Gestion du courrier, de l'agenda, préparation des interventions: "mon épouse a pris en charge ces tâches simples mais essentielles".
Entendue le 30 janvier avec son mari par les policiers de l'office anticorruption (Oclciff), la discrète Galloise, sans profession connue jusque-là, a dit n'avoir "jamais officialisé" sa "qualité d’assistante parlementaire", évoquant, pour sa collaboration avec M. Joulaud, des entretiens "très informels", "jamais de compte-rendu écrit".
Ses déclarations passées jettent le trouble: en mai 2007, elle affirmait à un journal britannique n'avoir "jamais été" l’assistante de son mari.
Juridiquement, il est difficile de prouver qu'un emploi est fictif, d'autant que le contrat d'un collaborateur parlementaire relève du droit privé: son employeur, le député, fixe sa rémunération et ses conditions de travail.
- Charles et Marie au Sénat -
Marie et Charles Fillon ont été embauchés comme assistants parlementaires de leur père quand il était sénateur. La première a perçu 3.800 euros brut par mois d'octobre 2005 à décembre 2006 et le second 4.846 euros brut par mois de janvier à juin 2007.
François Fillon a expliqué aux enquêteurs, d'après Le Monde, que sa fille l'avait aidé à écrire un livre, publié en 2006, et que son fils avait travaillé sur le programme de Nicolas Sarkozy pour la présidentielle de 2007 "sur des sujets institutionnels".
Les collaborateurs "assistent les sénateurs dans l'exercice de leurs fonctions", selon le règlement du Sénat. Les missions des enfants Fillon entraient-elles dans ce champ de compétences? Ils ont été entendus le 9 février.
- La Revue des deux mondes -
L'enquête vise aussi les chefs d'abus de biens sociaux et de trafic d'influence. Ce volet concerne les salaires touchés par Penelope Fillon à la Revue des deux mondes: environ 100.000 euros brut de mai 2012 à décembre 2013. Là aussi, les enquêteurs s'interrogent sur la réalité de son travail.
Le propriétaire de la revue littéraire est l'homme d'affaires Marc Ladreit de Lacharrière, un proche du candidat de la droite, dont la holding Fimalac a été cliente de la société 2F Conseil de l'ex-Premier ministre. Il a assuré que l'emploi de Penelope Fillon n'avait "rien de fictif" et réfuté tout lien entre ce poste et son élévation en 2010, sous le gouvernement Fillon, au grade de grand'croix de la Légion d'honneur.
Enfin, les investigations vont porter sur d'éventuels manquements aux obligations de déclaration à la Haute Autorité sur la transparence de la vie publique (HATVP). Les juges devront déterminer si François Fillon a omis de déclarer ou sous-évalué certains biens à l'institution créée en 2013 après le scandale Cahuzac.
- Les suites judiciaires -
Les magistrats ont désormais la possibilité de convoquer un ou plusieurs des protagonistes du dossier à tout moment en vue d'une éventuelle mise en examen ou d'un placement sous le statut intermédiaire de témoin assisté.
Mais le calendrier, extrêmement serré, rend peu probable une mise en examen de François Fillon avant le premier tour de la présidentielle, le 23 avril.
Les avocats du couple, Mes Antonin Lévy et Pierre Cornut-Gentille, n'auront accès au dossier qu'à partir du moment où leurs clients seront convoqués. Selon eux, l'ouverture de l'information judiciaire confirme que le PNF "n'a pas pu démontrer la réalité des infractions poursuivies", puisqu'il aurait pu choisir plutôt la voie d'une "citation directe devant le tribunal" correctionnel.
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