La Constitution américaine vient de sauver la République
CHRONIQUE — Après onze mois au pouvoir, Joe Biden a perdu le contrôle du pays.
En moins d'un an d'exercice du pouvoir par Joe Biden, l'inflation est à un niveau jamais atteint aux États-Unis depuis 39 ans (6,9 % en rythme annuel — on rappellera que la Maison-Blanche et Janet Yellen, son ministre du Budget ont promis au printemps dernier que l'inflation serait "transitoire").
Le prix de l'essence à la pompe a augmenté de 60 % (après que le président ait interdit la construction aux États-Unis de pipelines ainsi que l'exploration et le forage de gaz naturel sur le domaine national), plus de 2 millions d'immigrés clandestins ont franchi la frontière avec le Mexique (le chiffre le plus élevé depuis 60 ans, ce qui correspond d'ailleurs à une promesse électorale formulée par Joe Biden pendant la campagne, citant même l'objectif de deux millions d'entrées), l'armée américaine a quitté l'Afghanistan dans le chaos (laissant 13 soldats américains morts, des centaines de citoyens américains prisonniers des Talibans et des milliards de dollars d'équipements militaires, Joe Biden qualifiant l'opération de "succès extraordinaire"), la criminalité atteint des niveaux records dans les villes des États-Unis gérées par des maires démocrates, la dette publique a augmenté de quatre trillions de dollars, 400 000 Américains sont décédés du virus du Covid en 2021, c'est-à-dire plus qu'en 2020, et ce, en dépit de la distribution de vaccins et de traitements, alors que le président avait annoncé pendant la campagne électorale qu'il avait un plan pour éliminer le virus.
Joe Biden essuie donc échec sur échec et transforme chacune de ses initiatives en désastre.
Le déclin physique et mental de Joe Biden
Son déclin physique et mental est évident. Il s'écroule à plusieurs reprises quand il monte les escaliers d'Air Force 1, il est incapable de s'exprimer en public sans lire un téléprompteur (et quand il ne lit pas son téléprompteur, personne ne comprend ce qu'il dit) et son entourage empêche désormais les journalistes de lui poser des questions à la fin de ses interventions publiques.
"Le dirigeant du pays le plus libre de la planète — en fait le dirigeant du monde libre — a peur de répondre aux questions. C'est une atteinte à la liberté de la presse", s'indigne à ce sujet le sénateur Kevin Cramer.
Un couple Biden / Harris historiquement impopulaire
Joe Biden est devenu le président le plus impopulaire de l'histoire des États-Unis en moins d'un an au pouvoir, avec 38 % d'opinions favorables. Cerise sur le gâteau, le vice-président Kamala Harris, qui ne manque pas une occasion de dévoiler au public son incompétence crasse, réussit à être encore plus impopulaire que lui, avec seulement 28 % d'opinion favorable.
La protection des institutions
Le pays est donc au bord du gouffre. Toutefois, en dépit du fait que les démocrates contrôlent la Maison-Blanche, les deux chambres du Congrès, les médias, les universités et Hollywood, le pays sera sauvé de la catastrophe par sa Constitution et par ses institutions.
Le pouvoir des juges
En premier lieu, Joe Biden vient d'encaisser une série de défaites judiciaires spectaculaires. Récemment, les juges ont rendu caduque la partie de la loi sur les aides publiques de 1,9 trillion de dollars (pour lutter contre les conséquences économiques de la crise du virus — American Rescue Plan de mars 2021) qui interdisait aux États de réduire leur fiscalité s'ils voulaient obtenir des subventions fédérales.
L'enjeu est de taille, car les États républicains (Floride, Texas...) bénéficient d'un exode massif de résidents des États gérés par la gauche où les habitants sont écrasés d'impôts (Californie, New York...). Cela permet alors à ces États de droite de gagner de nouveaux sièges à la Chambre des représentants au détriment des États qui voient leur population diminuer. D'après le dernier recensement (2020), cinq nouvelles circonscriptions devraient être transférées des États de gauche au bénéfice d'États de droite aux prochaines élections législatives de 2022. L'impact est considérable, sachant que les démocrates ne détiennent qu'une majorité de trois sièges actuellement à la Chambre.
Par ailleurs, les ordonnances présidentielles sont abrogées les unes après les autres par les juges. Tel fut le cas notamment des ordonnances abrogeant la politique de contrôle de l'immigration de Donald Trump à la frontière mexicaine ("Remain in Mexico policy"), interdisant l'expulsion des locataires durant la crise du coronavirus ou rendant obligatoire la vaccination contre le virus du Covid-19 des sous-traitants de l'administration fédérale ainsi que du personnel médical et des salariés des entreprises du secteur privé, les juges citant de façon systématique "de graves violations de la constitution" (!)
Le rempart de la Cour suprême
Ces contentieux finiront par être tranchés par la Cour suprême, dont les neuf juges nommés à vie par les présidents successifs sont totalement indépendants du pouvoir en place. En l'espèce, six des neuf juges actuels ont été nommés par des présidents républicains (dont trois par Donald Trump) alors que seulement trois l'ont été par des présidents démocrates. Le bon fonctionnement du système des "check and balances" (équilibre des pouvoirs) est garanti.
Le pouvoir du Sénat
En novembre 2020, les démocrates ont obtenu la majorité à la fois à la Chambre des représentants et au Sénat. Plus précisément au Sénat, la droite et la gauche comptent chacune 50 sénateurs. En cas de blocage, le vice-président Kamala Harris apporte son vote, apportant alors la majorité aux démocrates.
À la différence de la France, la Chambre des représentants ne peut pas imposer sa volonté au Sénat. Les textes de lois doivent, en effet, être adoptés dans les mêmes termes par les deux chambres du Congrès. Il suffit donc d'une opposition sans faille des 50 sénateurs républicains et d'une défection dans le camp des 50 sénateurs démocrates pour qu'un projet de loi adopté à la Chambre des représentants ne puisse pas devenir texte de loi.
L'adoption de la loi de finances pour 2022 bloquée par un seul sénateur
Et, c'est exactement ce qu'il vient de se passer. Dimanche 10 décembre, le sénateur démocrate de la Virginie-Occidentale Joe Manchin annonce à la télévision nationale, après trois mois d'intenses négociations avec la Maison-Blanche, qu'il ne votera pas le projet de loi de finances pour 2022 intitulé "Build Back Better" (BBB). On assiste alors en direct au naufrage de la loi phare du programme social et environnemental de Joe Biden.
On savait le projet mal en point depuis que le Congressional Budget Office avait constaté que les dépenses évaluées par la Maison-Blanche à 1,75 trillion de dollars atteignent en fait 4,9 trillions de dollars, ajoutant trois trillions de dollars à la dette publique. Et ce, alors que depuis des mois, la Maison-Blanche et Nancy Pelosi, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, martèlent aux médias que cette loi "ne coûte rien" (c'est-à-dire est entièrement financée par les augmentations d'impôts).
Joe Manchin porte l'estocade à ce projet de loi qui visait à mettre en place des programmes sociaux gigantesques, financés par la dette publique et par une augmentation massive des impôts des entreprises et des particuliers.
Pour justifier son véto, il met en avant le risque d'augmentation de l'inflation induit par ces nouvelles dépenses publiques massives. Surtout, il n'oublie pas que Donald Trump a remporté avec 39 points d'avance (68 % contre 29 % pour Biden) l'intégralité des comtés de la Virginie-Occidentale lors de la dernière élection présidentielle de 2020 et que 65 % des électeurs de cet État désapprouvent actuellement l'action du président Biden.
"C'est inexplicable", réagit la porte-parole de la Maison-Blanche. "Joe Manchin a tué le programme législatif de Joe Biden et sans doute également le futur de la démocratie américaine", renchérit le journaliste Mehdi Hasan (MSNBC).
"C'est le début de la fin de la présidence de Joe Biden", commente le journaliste Joe Concha (The Hill). "C'est la guerre civile au sein du parti démocrate. Les socialistes du parti ne vont pas abandonner leur rêve socialiste. Pourquoi diable Joe Biden a-t-il proposé un programme de redistribution sociale aussi gigantesque avec une majorité aussi faible au Congrès. Il s'est pris pour FDR ?", s'interroge le journaliste anglo-américain Stuart Varney sur Fox News.
Le contraste avec Donald Trump est saisissant. Fin 2017, Donald Trump achevait sa première année au pouvoir avec l'adoption de sa réforme fiscale historique de baisse des prélèvements obligatoires — qui génèrera en deux ans à la fois croissance, augmentation des salaires et élimination du chômage dans le pays — alors que Joe Biden finit sa première année avec un échec retentissant, son projet d'augmentation à la fois des impôts et des dépenses sociales étant enterré par le Sénat.
"Le pays est effectivement dirigé par Joe. Mais ce n'est pas Joe Biden", réagissent les commentateurs, qui s'attendent désormais à ce que Joe Manchin rejoigne le Parti républicain, ce qui offrirait alors la majorité du Sénat aux républicains avant l'heure.
La majorité renforcée de 60 %
Qui plus est, la règle de la majorité simple ne s'applique en principe qu'aux lois budgétaires. Les autres lois doivent être adoptées par le Sénat à la majorité qualifiée de 60 sénateurs sur 100 ("Filibuster rule", en vigueur depuis 180 ans).
Ce qui signifie que dans la configuration actuelle, les démocrates doivent obtenir l'accord d'au moins dix sénateurs républicains pour qu'une loi non budgétaire soit adoptée, comme par exemple sur l'amnistie des immigrés clandestins ou sur la réforme du droit électoral.
La réforme du droit électoral bloquée au Sénat
Les efforts du Parti démocrate pour faire adopter au Sénat le projet de loi sur la réforme du droit électoral ("HR 1 - For the People Act" adopté par la Chambre des représentants en mars 2021) sont vains.
Aucun sénateur républicain n'y est favorable, y voyant une tentative de la part des démocrates d'instaurer à l'échelle de la nation de façon permanente les outils qui ont permis la fraude électorale du mois de novembre 2020 dans certains États clés (notamment par le biais de l'absence de contrôle de l'identité des électeurs associés à l'instauration du vote par correspondance universel).
Sauf à ce que le Sénat accepte d'abolir la règle de la majorité renforcée. En effet, théoriquement, une majorité simple devrait suffire pour abolir la Filibuster rule au Sénat.
Toutefois, deux sénateurs démocrates centristes ont déjà fait savoir leur opposition absolue à une telle modification des droits de l'opposition, sachant pertinemment que les démocrates risquent de se retrouver eux-mêmes dans la minorité au Sénat très rapidement...
Les élections de mi-mandat
La Constitution prévoit en effet que les élections législatives et sénatoriales se déroulent tous les deux ans (renouvellement complet de la Chambre et renouvellement d'un tiers du Sénat, le mandat de sénateur étant de six ans). Cette règle distingue les États-Unis des grandes démocraties modernes, qui retiennent en général une période de quatre à cinq ans entre les élections législatives. L'alternance est donc possible tous les deux ans aux États-Unis, ce qui permet d'éviter les abus de pouvoir sur le long terme, les rédacteurs de la Constitution américaine de 1787 se méfiant de la "one party rule" (situation où un seul parti détient tous les pouvoirs).
Les prochaines élections auront donc lieu dans moins d'un an, en novembre 2022, donnant l'opportunité au peuple américain de renvoyer les démocrates dans le camp de l'opposition.
À l'heure actuelle, les républicains sont crédités d'une avance de 10 % de votes aux prochaines élections de mi-mandat, ce qui est du jamais vu dans l'histoire politique américaine.
Dans ces conditions, Joe Biden réussira peut-être à battre le record de Barack Obama, qui avait perdu 64 sièges à la Chambre et 12 sénateurs lors des élections de mi-mandat de novembre 2010.
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