Réforme du code du travail par ordonnances : "La période est très favorable au gouvernement"
Le gouvernement vient de communiquer aux partenaires sociaux sa feuille de route sur son projet de réforme du code du travail qui se fera par ordonnances. Sans surprise, au programme figurent des barèmes maximum pour les décisions des prud'hommes, des référendums d'entreprise à l'initiative de l'employeur et la redéfinition du rôle et de la place de la branche dans l'échelle des normes. Soit tout ce contre quoi se sont battus les syndicats en 2016 lors du mouvement contre la Loi travail. Mais la dynamique a changé et les partenaires sociaux vont sans aucun doute faire évoluer leur position, comme l'explique à FranceSoir Hubert Landier, expert en relations sociales et vice-président de l'Institut international de l'audit social.
> La CFDT semble être prête à lâcher du lest sur la barémisation des indemnités prud'homales et à discuter sur la hiérarchie des normes. Pourquoi un retournement sur ce qui semblait inenvisageable à l'époque de la Loi travail?
"La CFDT s'inscrit dans une logique de conciliation. Ce syndicat ne veut pas s'opposer frontalement à un gouvernement qui vient de rentrer en fonction. Si elle est maintenant conciliante sur les indemnités prud'homales, c'est parce qu'elle espère pouvoir négocier efficacement sur la question sensible de la hiérarchie des normes. Et obtenir le plus important: des garanties pour les salariés.
"La CGT reste ferme sur la question des indemnités prud'homales car elle a une tradition +jacobine+, et ne raisonne que par le sommet ne faisant pas toujours confiance à ses représentants locaux dans les négociations et les suspectent de faire du dumping. A l'inverse la CFDT fait confiance à ses sections et se repose beaucoup sur elles. Elle est donc plus encline à être conciliante sur une mesure nationale comme les indemnités prud'homales, pour trouver un recours favorable sur une question comme les rapports entre les branches et les entreprises".
> Mais les syndicats comme la CGT qui restent intransigeants ont-ils une position favorable dans un rapport de force où La République en Marche pourrait largement dépasser les 300 députés?
"Non. Clairement, la période est très favorable au gouvernement. Le président a montré sans détour qu'il veut aller vite, pour profiter de l'état de grâce. Et d'ailleurs, la CGT dit +non+ par principe, mais il est possible que l'organisation se mette à la table pour discuter d'un compromis qui ne lui soit pas trop défavorable. Tout dépendra en fait de la manière dont se passeront les deux réunions préalables au dépôt du projet de loi autorisant les ordonnances, le 28 juin prochain".
> Le gouvernement a tenu à préciser que les partenaires sociaux seront "écoutés et respectés" dans le cadre de la réforme du code du travail. Mais l'exécutif acceptera-t-il qu'ils puissent vraiment peser? Est-ce dans la culture du nouveau gouvernement?
"Dans l'absolu, les lois de la République n'ont pas à être négociées avec les partenaires sociaux, mais seulement discutées dans le cadre d'une concertation. C'est la délégation nationale qui légifère. Tout dépendra surtout du climat social et de la poursuite ou non de l'état de grâce en septembre. S'il se poursuit, les syndicats ne pourront qu'acquiescer et la CGT tentera, pour le principe, un baroud d'honneur dans la rue. Mais dans le cas contraire, suite à une faute ou une maladresse grave, comme quand Manuel Valls avait refusé de recevoir Philippe Martinez à l'époque de la Loi travail, un durcissement pourrait être possible. Tout dépendra enfin des garanties apparentes, nécessaires pour éviter une contestation syndicale, qui seront données, notamment sur l'inversion des normes. Le contexte est très favorable au gouvernement, mais l'apparence comptera malgré tout".
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