De Monsanto à la BCE en passant par le FMI, Lagarde pousse comme un OGM sans glyphosate...

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France-Soir
Publié le 04 novembre 2023 - 12:00
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Christine Lagarde
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FREDERICK FLORIN AFP
Christine Lagarde : le gros de sa crise pourrait être devant elle
FREDERICK FLORIN AFP

PORTRAIT CRACHE - Première femme à la tête du cabinet d’avocats Baker McKenzie et de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, ancienne directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), ancienne ministre et considérée comme l’une des femmes les plus influentes et puissantes au monde, a commis son lot de bourdes et de maladresses durant son parcours, mais s'est également retrouvée dans des situations scabreuses : mise en examen dans l’affaire Tapie, risque de conflits d’intérêts, sociétés offshore...  

Lorsqu’elle est sollicitée en 2005 par Dominique de Villepin, Premier ministre (2005-2007) sous Jacques Chirac, Christine Lagarde, femme d’affaires "accomplie” et “expérimentée”, est méconnue de la scène politique française et l’exercice de la politique ne lui est pas familier. Si l’actuelle présidente de la BCE est classée parmi les plus puissantes femmes d'Europe par la presse anglo-saxonne, ses débuts comme ministre déléguée au Commerce extérieur puis ministre de l’Agriculture sont difficiles et marquants. 

Après l’obtention de son baccalauréat en 1974, Christine Lagarde, née le 1er janvier 1956 à Paris, poursuit ses études à l’institut d’études politiques d’Aix-en-Provence. Elle tente à deux reprises d’entrer à l'Ecole nationale d’administration (ENA) mais échoue et obtient deux maîtrises, l’une en anglais et l’autre en droit des affaires, ainsi qu’un diplôme d’études supérieures spécialisées de droit social, domaine dans lequel elle commence sa carrière.  

Caricature Lagarde

 

Un mois seulement à la Pêche après le message Breton...

Elle est admise au barreau de Paris comme avocate et rejoint, en 1981, le cabinet américain d’avocats d'affaires Baker McKenzie. Christine Lagarde est d’abord recrutée au département de droit social du bureau parisien, mais gravit vite les échelons. En 1987, elle est associée du bureau parisien. En 1991, elle en devient associée-gérante avant de s’envoler en 1995 à Chicago (États-Unis) en sa qualité de membre du comité exécutif mondial de Baker McKenzie. L’avocate atteint l’apogée de sa carrière au sein du cabinet en 1999, en devenant présidente et la première femme à diriger une société de juristes ainsi que le premier ressortissant non-américain à ce poste. 

Son ascension attire l’attention de médias anglophones comme le Wall Street Journal qui la classe, en 2002, cinquième femme d’affaires européenne. Sa carrière chez Baker McKenzie, dont elle dirige également le comité stratégique mondial, prend fin en 2005. 

Elle débarque alors de Chicago à Paris. “Ce qui m'a donné envie de rentrer, c'est le message de Dominique de Villepin et de Thierry Breton, me disant que je pouvais aider dans le domaine du commerce extérieur”, explique-t-elle lorsqu'elle est nommée ministre déléguée au Commerce extérieur. Les débuts de Christine Lagarde sont surtout marqués par une bourde. Elle estime nécessaire de réformer le Code du travail et le déclare publiquement avant d’être rappelée à l’ordre par Dominique de Villepin. 

“C'était assez impressionnant. J'ai réalisé très vite que je perdais ma liberté de parole. C'est probablement ce qui m'a le plus choquée, parce que, comme avocats, nous avons évidemment une parole très libre (...). Dès le lendemain matin, on m'a fait comprendre que le Code du travail n'était pas dans mes attributions”, témoigne-t-elle. Son bilan à ce poste gouvernemental n’est pas non plus remarquable, bien qu’elle le juge “pas si mauvais”, puisque le déficit du commerce extérieur de la France atteinten 2006, le montant record de 29,211 milliards d'euros.

Nicolas Sarkozy succède en 2007 à Jacques Chirac et le nouveau président de la République française confie à l’ex-présidente de Baker McKenzie le poste de ministre de l’Agriculture et de la Pêche. “Son expérience dans les négociations internationales” ont plaidé en sa faveur, selon son prédécesseur, Dominique Bussereau. Mais son mandat à la tête du ministère ne dure qu’un mois, assez pour convaincre les 27 États membres de l’UE d’autoriser un label européen aux produits biologiques contenant des traces d’OGM à hauteur de 0,9%.

La mesure provoque immédiatement la colère des associations écologistes, obligeant Alain Juppé, alors ministre de l’Ecologie, à annoncer un possible moratoire sur certaines cultures comme celle du maïs transgénique MON810 de la société américaine Monsanto. Une possibilité à laquelle s’oppose la ministre de l’Agriculture, appelant à “se donner le temps de réfléchir avant de prendre une décision”

Des élus écologistes s’interrogent surtout sur le risque de conflit d’intérêts concernant Christine Lagarde, puisque Monsanto n’est autre que le client de Baker McKenzie, celui-là même que la ministre de l’Agriculture a présidé de 1999 à 2005. D’ailleurs, la relation entre les deux entreprises américaines est étroite puisque le cabinet d’avocats d’affaires a assisté Monsanto dans un projet agricole en Ukraine et c’est son bureau parisien qui a défendu l’agrochimiste, condamné en France en 2021 par la CNIL à une amende de 400 000 euros pour ses pratiques de lobbying.

Habitée par Davos et rhabillée par les Pandora Papers

Christine Lagarde est ensuite nommée ministre de l’Économie. Celle qui est décrite comme une habituée du Forum de Davos (Forum économique mondial) se maintient à son poste de 2007 à 2011. Période durant laquelle elle fait adopter plusieurs réformes comme la loi Travail, emploi et pouvoir d’achat (TEPA) et la loi de modernisation de l’économie, mais la mise en place de règles pour stimuler la concurrence et faire baisser les prix dans la grande distribution n’obtiennent pas l'effet escompté.

Tout comme lors sa première expérience comme ministre déléguée, à Bercy, Lagarde commet un certain nombre de bourdes politiques, notamment son implication dans l’affaire opposant Bernard Tapie au Crédit Lyonnais. On peut aussi évoquer sa liberté de parole puisqu’elle ose affirmer en 2007 que “le gros de la crise est derrière nous”. Un an plus tard, la faillite de la banque américaine Lehman Brothers précipite le monde dans le chaos économique.

En 2011, après la démission de Dominique Strauss-Kahn, accusé d’agression sexuelle à New York, de son poste de directeur général du FMI, Christine Lagarde annonce sa candidature en mai avant d’être élue un mois plus tard, grâce aux soutiens des États-Unis, de pays européens et de la Russie. Elle est reconduite en 2016 pour un mandat de 5 ans, jusqu’à 2021, année où son passé chez Baker McKenzie la rattrape, dans le cadre de l'affaire des Pandora Papers, une enquête impliquant 150 médias internationaux sur la base de la fuite de 12 millions de documents confidentiels issus des archives de 14 cabinets spécialisés dans la création de sociétés offshore dans les paradis fiscaux.

On y apprend qu’entre 2003 et 2005, Christine Lagarde a été directrice d'une société appartenant au cabinet américain et enregistrée aux Bermudes, un territoire qui figurait à l'époque sur la liste noire des paradis fiscaux de l'Union européenne. Si Baker McKenzie affirme que son ancienne présidente “n’avait aucun intérêt économique” dans cette société offshore, il ne fait aucun doute que le cabinet basé à Chicago a joué un rôle dans l’élaboration du système offshore au profit de ses clients... 

BCE : crédit social au taux directeur... 

En octobre 2019, quelques mois après avoir démissionné de son poste à la tête de l’Institution de Bretton Woods, Christine Lagarde est nommée présidente de la BCE en remplacement de Mario Draghi : première expérience à la tête d’une banque centrale et première femme à occuper cette fonction.

Au sein de cette institution européenne, Christine Lagarde est le porte-étendard du projet contesté d’un euro numérique et se distingue en augmentant, dix fois consécutivement, les taux directeurs de la BCE jusqu’à atteindre des niveaux records, afin de lutter contre l’inflation dans la zone euro. 

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